SQL Server 2005 : attention aux coûts cachés présents et futurs !


Rédigé par le 20 Septembre 2005

Difficile d’échapper en cette fin d’année 2005 à l’événement mondial orchestré par Microsoft à la gloire de SQL Server 2005. Il est vrai que cela faisait presque cinq ans que l’on attendait une nouvelle mouture de la base de données de Microsoft, et que l’éditeur avait pris soin de l’annoncer il y a près d’un an dans le détail, faisant par avance saliver les plus impatients.



Les « experts indépendants-partenaires » de Microsoft rivaliseront de talent début novembre pour mettre en lumière les atouts de cette nouvelle version, tous plus enthousiastes les uns que les autres à l’idée des services qu’ils pourront rapidement vendre à leurs clients autour de cette nouvelle solution. Atouts indéniables qui font de SQL Server 2005 une des bases de données décisionnelles au meilleur rapport fonctionnalités/prix du marché. Mais au risque de me démarquer de l’excitation générale autour de ce lancement, il me semble utile d’en pointer quelques aspects qui peuvent se révéler négatifs pour l’entreprise utilisatrice.

Des partenaires poussés dans leurs retranchements

Inutile de revenir trop lourdement sur ce point, SQL Server 2005, par ses fonctions avancées d’alimentation, de data mining, de tableaux de bord, de reporting, rend inutile un certain nombre de solutions partenaires des éditions précédentes de SQL Server. C’est d’ailleurs l’argument essentiel de Microsoft, qui nous vend une solution intégrée couvrant l’ensemble des besoins d’un utilisateur décisionnel. De partenaires il n’est d’ailleurs plus nécessaire dans une configuration de base où Integration Services, SQL Server, Analysis Services, Reporting Services, Report Builder et Excel, vous permettent de développer un système complet. Si vous avez déjà mis en œuvre un ETL, un système de reporting, que faire de ces « anciens » produits ? Les conserver, et ne pas profiter des nouvelles fonctions de SQL Server, ou les abandonner avant qu’ils ne soient réellement amortis ?

Une vente forcée à laquelle on se soumet avec le sourire !

SQL Server 2005 se suffit-il à lui-même ? En quelque sorte oui puisqu’il propose cette plate-forme intégrée. Mais en réalité, SQL Server 2005 et ses modules associés se nourrisent largement d’autres produits Microsoft.

Voici quelques exemples :
- Dès la page d’accueil dédiée à SQL Server 2005, le site web de Microsoft annonce la couleur, avec le titre « SQL Server and Visual Studio: Great Separately. Even Better Together », « SQL Server Visual Studio : de bons produits pris séparément, encore mieux utilisés ensemble »… On pourrait y ajouter le produit Visio, bien utile pour dessiner les schémas de base de données, et les générer dans SQL Server.
- Bien entendu SQL Server 2005 fonctionnera sous Windows Server 2000 SP4, mais il bénéficiera largement des avancées de Windows Server 2003. C’est d’ailleurs la même chose pour Reporting Services. Les clients sont donc fortement incités à migrer leurs serveurs.
- Maestro, le futur produit Microsoft permettant de créer des tableaux de bord prospectifs et de mettre en page des indicateurs métiers, s’appuiera sur le portail SharePoint pour la diffusion des indicateurs.
- Et surtout, en mettant en place SQL Server 2005, vous prenez une option forte pour migrer vos applications bureautiques vers Office 12 en 2006/2007. En effet le groupe en charge du développement de Office a déjà annoncé que cette nouvelle version de Office intégrera de nombreux développements en interaction avec SQL Server 2005.
- Et qui dit Office 12, dira forcément rapidement Windows Vista et son interface nouvelle génération dévoilée la semaine dernière à la conférence développeurs de Microsoft…
- Quant aux postes de travail, XP Pro est presque indispensable, ainsi que les dernières et futures versions de Internet Explorer. Qui sait si IE 7 prévu pour l’année prochaine ne contiendra pas des fonctions particulièrement utile de navigation dans les données.

Tout cela est à mettre en perspective avec les deux sources essentielles de revenu chez Microsoft, Windows et Office…
Microsoft doit d’ailleurs tenir compte du rythme de mise à jour choisi par le client, même s’il cherche à l’accélérer. Le lancement de Microsoft CRM a d’ailleurs souffert d’une trop grande dépendance à l’infrastructure Microsoft (Active Directory, Exchange…).

Les directeurs informatiques savent-ils ce qu’ils veulent ?

Il y a quelques années les directeurs informatiques ne vibraient que lorsqu’on l’on parlait d’ouverture, d’interopérabilité. Aujourd’hui ceux qui se lancent à corps perdus dans l’infrastructure Microsoft semblent avoir oublié leurs attentes de la décennie précédente.
Regrettent-ils le temps de leurs aînés, lorsque IBM fournissait les mainframes, les logiciels associés, les services, et l’évolution de carrière du directeur informatique qui avait su conserver son costume bleu marine ?
En choisissant une architecture 100 % Microsoft, ils doivent être conscients de l’investissement futur qu’ils s’imposent et imposent à leur entreprise. SQL Server 2005 est un des serveurs de bases de données les moins chers du marché. Mais ne faudrait-il pas en calculer le coût complet sur plusieurs années, en ajoutant les multiples mises à jour de produits connexes que Microsoft parviendra à nous faire adopter.
Qui saura faire ce calcul et le comparer aux autres solutions du marché ?
Et que les DSI ne viennent pas ensuite se plaindre des tarifs ou des modes de licence de Microsoft, alors qu’ils cautionnent la stratégie de Redmond en acceptant ainsi de lier les différents produits les uns aux autres.
Tous ne sont d’ailleurs pas convaincu, à l’image d’un responsable informatique d’une très grande entreprise industrielle française qui me disait il y a quelques jours : « SQL Server pour de petites applications départementales pourquoi pas, mais pour le data warehouse de l’entreprise certainement pas, je préfère faire confiance à Oracle ou IBM ». Microsoft a encore beaucoup de chemin à faire pour convaincre les indécis.

Passer du décisionnel construit au décisionnel acheté

Mais finalement existe-t-il d’autres alternatives ? Certainement nous répondront Oracle, Hyperion ou IBM. Mais ne sont-ils pas tentés de suivre la même démarche que Microsoft et d’associer leurs produits. L’exemple de la suite Oracle avec Warehouse Builder et Discoverer peut le laisser à penser. Un marché existe-t-il encore pour les solutions modulaires et les architectures décisionnelles construites à partir de briques ?
Cette question est importante. La réponse peut même éventuellement marquer un tournant dans l’histoire des systèmes décisionnels. Jusqu’à présent, on a toujours expliqué qu’un système décisionnel se construisait. Et les SSII qui fournissent le ciment de cette construction allaient dans ce sens. Microsoft ouvre-t-il la voie d’un système décisionnel que l’on achète ? Et si c’est le cas, quel est le rôle à moyen terme des intégrateurs. Moins on a besoin de ciment, moins on a besoin de maçons ?



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